Mots pluriels
    no 22. septembre 2002.
    https://www.arts.uwa.edu.au/MotsPluriels/MP2202ab.html
    © Angèle Bassolé


    A la recherche du royaume perdu : l'image de l'enfance chez les poètes africaines

    Angèle Bassolé
    Table Féministe Francophone de Concertation Provinciale de l'Ontario (TFFCPO)

    Si le royaume de l'enfance évoqué par Senghor tout au long de son oeuvre poétique a pu faire rêver plus d'un lecteur sur l'existence au temps jadis d'une Afrique paisible et idyllique où l'enfant, bien précieux de toute la communauté, vivait et s'épanouissait à l'ombre des tribulations des adultes, la réalité de l'Afrique actuelle donne à croire que ce ne fut qu'un rêve de poète.

    L'Afrique du XXI e siècle, plongée dans un clair-obscur dont nul ne sait quand, comment, et par quel miracle elle sortira, cette Afrique-là dans laquelle la guerre, les affrontements, la violence et la barbarie sans nom sont devenus les seuls langages connus, offre de l'enfance une image bien désolante.

    Au Rwanda, des enfants de 13-15 ans sont devenus par la force des choses des chefs de famille, des enfants qui, alors qu'ils devraient vaquer aux jeux insouciants de leur âge et fréquenter l'école, se retrouvent responsables d'autres enfants, de leurs frères et soeurs plus jeunes parce que la guerre a emporté sous leurs yeux innocents leurs parents. En Algérie, dans la guerre que se livrent des ennemis anonymes, des enfants sont massacrés quotidiennement, hachés et déchiquetés, nouveaux-nés, enfants sachant à peine marcher, écoliers, aucun n'échappe à la dérive meurtrière d'adultes fanatiques. En Côte d'Ivoire, un documentaire [1] nous permet de découvrir l'existence d'enfants esclaves employés dans des plantations de café et de cacao, qu'on achève et enterre à la sauvette dès qu'ils sont malades. Et dire que c'est sur cette même terre de Côte d'Ivoire que les arrière-grands-parents de ces enfants ont lutté pour l'abolition des travaux forcés (promulguée en 1946[2]) ! Des navires douteux où sont entassées des cargaisons d'enfants sont régulièrement arraisonnés sur les côtes africaines, rappelant les sinistres négriers.

    Quel sentiment autre que l'effroi pourrait nous animer face aux images des enfants-soldats du Libéria-Angola-Sierra-Léone-Soudan ? Sur ces fronts, des fillettes sont enlevées, séquestrées pour servir d'esclaves sexuelles aux chefs de guerre sans scrupule ni humanité. Comment ne pas être saisi de frissons quand des enfants racontent comment on les a obligés à tuer leurs propres parents et comment ils ont mangé des organes humains[3] ? Comment redevenir enfant et pouvoir mener une vie normale après une telle descente aux enfers ?

    Afrique, que sont tes enfants devenus ? A quel avenir les as-tu promis ? Où est donc le royaume de l'enfance, Senghor ?

    Les poètes africains témoignent de leur époque et de l'histoire de leurs pays, de leur continent. Le thème de l'enfance a subi une profonde métamorphose au cours de l'histoire de la littérature africaine. Les récits de l'Enfant noir[4] qui peignent un Laye insouciant, heureux, baignant dans une harmonie familiale et sociale parfaite contrastent nettement avec le portrait de Birahima, l'enfant-soldat, héros malgré lui, victime et bourreau à la fois que nous livre Kourouma[5]. Qu'en est-il de la fresque de l'enfance que nous proposent les poètes africaines ?

    L'image de l'enfant présentée par les pionnières des années 65-80 (Annette Mbaye d'Erneville, Fatou Ndiaye Sow, Werewere Liking) diffère-t-elle de celle des poètes de 87-2002 (Véronique Tadjo, Tanella Boni, Zénab Diallo Koumanthio) ?

    Cette étude s'intéressera au portrait de l'enfance chez les poètes africaines entre 1960 et maintenant. Y a-t-il eu mutation ? Si oui, comment s'est-elle opérée et à quel niveau ? Nous nous demanderons s'il est encore possible d'être enfant en Afrique aujourd'hui ou si ce n'est plus qu'une chimère de rêveurs qui croient encore à l'existence d'un royaume où pureté, innocence, joie et insouciance seraient les maîtres-mots.

    I . PORTRAITS DU ROYAUME DE L'ENFANCE
    1. La génération de la Négritude

    S'il est une constante dans la littérature africaine depuis ses débuts (littérature, qui, faut-il le rappeler, est née de la poésie), c'est bien ce thème du royaume de l'enfance, inauguré et porté aux nues par les chantres de la Négritude. Il faut cependant préciser que l'évocation idyllique de l'enfance a plus été le fait de Senghor que de Césaire ou de Damas. En effet, l'enfance évoquée par Césaire et Damas est bien différente du royaume revisité par Senghor. On se souviendra du récit de Césaire dans le Cahier :

      Au bout du petit matin, une petite maison qui sent très mauvais dans une rue très étroite, une maison minuscule qui abrite en ses entrailles de bois pourri des dizaines de rats et la turbulence de mes six frères et soeurs, une petite maison cruelle dont l'intransigeance affole nos fins de mois et mon père grignoté d'une seule misère, je n'ai jamais su laquelle, qu'une imprévisible sorcellerie assoupit en mélancolique tendresse ou exalte en hautes flammes de colère; et ma mère dont les jambes pour notre faim inlassable pédalent, pédalent de jour, de nuit, je suis même réveillé la nuit par la morsure âpre dans la chair molle de la nuit d'une Singer que ma mère pédale, pédale pour notre faim de jour et de nuit[6]

    Et de celui de Damas dans le poème " Hoquet " de son recueil Pigments :

      Et j'ai beau avaler sept gorgées d'eau
      Trois à quatre fois par vingt-quatre heures
      Me revient mon enfance dans un hoquet secouant mon instinct
      [...]

      Ma mère voulant d'un fils mémorandum
      Si votre leçon d'histoire n'est pas sue
      Dimanche
      Avec vos effets des dimanches

      Cet enfant sera la honte de notre nom
      Cet enfant sera notre nom de Dieu
      Taisez-vous
      Vous ai-je ou non dit qu'il vous fallait parler français
      Le français de France
      Le français du Français
      Le français français

      Désastre
      parlez-moi du désastre
      parlez m'en[7]

    Ces deux poèmes contrastent fort avec celui de Senghor justement intitulé " Enfance " :

      Mère, sois bénie !
      Je me rappelle les jours de mes pères, les soirs de Dyilor
      Cette lumière d'outre-ciel des nuits sur la terre douce au soir
      Je suis sur les marches de la demeure profonde obscurément.
      Mes frères et mes soeurs serrent contre mon coeur leur chaleur nombreuse de poussins
      Je repose la tête sur les genoux de ma nourrice Ngâ, de Ngâ la poétesse
      Ma tête bourdonnant au galop guerrier des dyoung-dyoung, au grand galop de mon sang de pur sang
      Ma tête mélodieuse de chansons lointaines de Koumba l'Orpheline[8]

    Les souvenirs d'enfance de Césaire et de Damas ont des accents de tristesse, de mélancolie tandis que ceux de Senghor sont tissés de tendresse, de douceur mélodique, de rêves, de berceuses. Notons les trois figures différentes de la mère dans ces textes : Césaire évoque une mère travailleuse inlassable qui peine nuit et jour pour subvenir aux besoins de ses enfants ; Damas, une mère intransigeante, ferme sur les principes, voire, terrorisante alors que Senghor par cette seule invocation, " Mère, sois bénie! " nous ouvre à un monde de plénitude, de joie, de chaleur familiale, de recueillement, de prière, d'exaltation qui ne se retrouve ni chez Césaire ni chez Damas.

    L'enfance exaltée et chantée par les poètes africains dits de la première et de la seconde génération exprime l'idéologie de la Négritude (pensons à Maxime Ndebeka[9] entre autres) et elle n'a rien à voir avec le moment où ces derniers sont venus à l'écriture. Cette exaltation cadre parfaitement avec le retour aux sources africaines tant prôné par la Négritude. La problématique ne se pose donc pas en termes de générations car on peut retrouver des traces du courant de la Négritude chez des poètes actuels. Une poète comme Annette Mbaye d'Ernerville pourrait facilement s'insérer dans cette veine car ses Poèmes africains ainsi que Kaddu célèbrent cette Afrique traditionnelle avec ses rites, ses valeurs culturelles, le quotidien de ses populations, la nostalgie des temps anciens[10].

    Les temps et les lieux de cette exaltation de l'enfance sont indéfinis, situés entre rêve et réalité, idéal et vécu quotidien. L'évocation du royaume de l'enfance diffère nettement selon le sexe. En effet, les poètes hommes qui célèbrent le royaume de l'enfance le font à partir de leur propre expérience d'enfance ce qui est rarement le cas sous la plume des femmes poètes. Ainsi lorsque Annette Mbaye évoque cette Afrique mythique ou que Véronique Tadjo rappelle le souvenir des griots, ce n'est jamais dans la même veine que Senghor ou Pacéré :

      RACONTE-MOI
      LA PAROLE DU GRIOT
      QUI CHANTE L'AFRIQUE
      DES TEMPS IMMEMORIAUX
      IL DIT
      CES ROIS PATIENTS
      SUR LES CIMES DU SILENCE
      ET LA BEAUTE DES VIEUX
      AUX SOURIRES FANES
      MON PASSE REVENU
      DU FOND DE MA MEMOIRE
      COMME UN SERPENT TOTEM
      A MES CHEVILLES LIE
      MA SOLITUDE
      ET MES ESPOIRS BRISES
      QU'APPORTERAIS-JE
      A MES ENFANTS
      SI J'AI PERDU LEUR ÂME[11] ?

    L'évocation du royaume d'enfance par les poètes femmes n'a pas les accents de celle du monde merveilleux de Senghor ou Pacéré qui écrit :

      Je suis né dans un village
      Perdu des savanes,
      Dans la chaleur du Sahel,
      Où la pluie nous vient des rivières !
      Chaque pierre
      A son histoire !
      Chaque feuille,
      Son histoire !
      C'est le lieu où se retrouvent
      Patiemment rassemblés
      Dans le coeur des aînés,
      Tous les souvenirs des fonds antiques !
      C'est une terre d'originalité,
      Une terre de fidélité,
      Où la case comme le ruisseau
      Le rocher comme la rivière
      Ne sont pas comme ailleurs[12]

    L'évocation de Pacéré se rapporte à ''son'' histoire, à ''son'' milieu, à ''son'' terroir : ''je suis né dans un village'' Celle des femmes paraît plus impersonnelle et collective :

      Je viens de ce pays étrange
      qu'on ne peut définir
      ce pays étrange où l'homme
      est l'être suprême de l'univers sensible[13]

    Cette différence de point de vue s'expliquerait-elle par la division sociale dans l'Afrique des pères, où les femmes et les hommes sont cloisonnés dans des univers différents, comme en témoignent ces vers de Maxime Ndebeka ?

      Tous les soirs autour d'un petit feu de bois
      Le village se regroupe et revit
      La femme apporte maniocs, viandes et riz
      L'enfant bien-né avec son père mange et rit
      La fille et la mère vivent loin de ce feu de bois[14]

    L'expérience du vécu de la petite fille est bien différente de celle du petit garçon. L'évocation des souvenirs ne peut donc pas avoir la même couleur ni les mêmes accents. Le paradis rêvé des hommes n'est pas celui des femmes.

    2. Temps et lieux de l'énonciation

    Le tragique de l'actualité est tel que le souvenir de l'Afrique immémoriale chez les femmes se confond avec l'image de l'Afrique d'aujourd'hui. Sous la plume des femmes (ou du moins des poètes), l'Afrique éternelle où tout serait beau et bien ne se distingue pas de l'Autre Afrique des malheurs perpétuels. Quand l'Afrique au passé glorieux est évoquée, c'est souvent en filigrane, comme à la hâte. L'évocation d'un royaume heureux reste anecdotique ; les poètes femmes ne s'y attardent pas :

      Notre champ se cultive mieux au présent        notre
      temps s'envole vers le futur immédiat        le
      passé quel passé ?        dépassé        transvasé
      dilué        troué le temps        de la parole-miel
      parole de paix du Pouvoir de guerre[15]

    Les femmes n'oublient pas que ce passé glorieux idéalisé par la Négritude et les hommes porte en soi les traditions aliénantes dont elles sont les éternelles victimes. Leur évocation du passé n'est pas figée car le rapport au temps et à l'espace des femmes n'est pas le même que celui des hommes :

      Deux composantes, souvent associées dans les travaux littéraires, nous paraissent fondamentales pour comprendre l'attitude des femmes face à l'écriture : le temps et l'espace. Ces deux éléments sont essentiels dans la mesure où ils servent de points de repère fixe, stable, aussi bien pour l'individu que dans une oeuvre littéraire. Cette solide structure nous permet de voir d'autant mieux le décalage que les femmes opèrent sur ces deux données. La volonté de rejeter en bloc toutes les contraintes conduit la femme à bouleverser les coordonnées spatio-temporelles.[16]

    L'espace social tel qu'il apparaît dans le contexte africain se révèle pour les femmes très restrictif, étroit, limité. Il leur est rarement, sinon jamais favorable. Les règles sociales leur imposent en effet des limites comme le précise Claudine Hermann : " L'espace est pour la femme, par définition, un lieu de frustration physique, morale et culturelle. C'est aussi par excellence le lieu du système et de la hiérarchie. L'espace interdit devient bientôt l'espace détesté, puis l'espace ignoré, c'est-à-dire nié[17]. " Ce qui expliquerait peut-être l'absence d'indices référentiels spatiaux dans l'évocation de leurs souvenirs. La volonté de déconstruire les contraintes spatiales imposées entraîne une écriture souvent marquée du désir de s'évader vers un espace libre, infini comme le montrent ces vers de Kiné Kirama Fall et de Tanella Boni :

      Ah il me faut
      Plus souvent quitter ces formes
      Pour mieux courir avec le bonheur
      Là où rien ne se déforme[18]

      Je suis Icare j'ai des ailes mes épaules s'égayent
      Vers Mercure        qui m'accueille à bras ouverts[19]

    Cet éclatement de l'espace est aussi produit par leur écriture qui se fait mouvante, évanescente, difficile à cerner. Cette écriture traque l'immobilisme (lié aux traditions rétrogrades) pour se mouvoir à son aise, sans barricades aucunes, sans titres de transport à exhiber :

      Ils occupèrent le lieu        inconnu de la loi        ils
      oublièrent le noir et blanc de la vie rétrécie        ils
      gravèrent en hiéroglyphes invisibles        l'espace
      magnifique sans vide sans frontières        ce fut
      un voyage de grains de sable        du désert à la mer[20]

      La terre la leur était immense sans limite[21]

    Tout comme l'espace, le temps a une connotation sociale négative dans le vécu des femmes. Comme le suggère Irma Garcia, " Socialement, la femme possède un temps très court entre l'enfance et la maternité. C'est pourquoi elle ressent intensément l'aspect négatif du temps[22] ". Ainsi, le temps suscite une hostilité encore plus ouverte parce qu'il constitue une énorme barrière qu'elles doivent re-situer, déplacer, voire nier, pour pouvoir exister :

      Va au-devant du temps
      Et fais-lui tes adieux[23]

      L'émotion arrivait        alors        au rendez-vous
      avec un quart d'heure de retard        et elle faisait
      la fête        tambour battant libérée        de        la
      tutelle du temps[24]

    Le temps jouant contre elles, c'est en ennemi qu'elles l'abordent. Insaisissable, ce temps qui fuit constitue un obstacle de taille à abattre pour les femmes. Elles choisissent donc de le narguer en mélangeant passé et présent. Ce faisant, elles brisent les structures temporelles imposées et observées socialement. Le temps oppressant n'existe plus dans leur imaginaire car elles le nient pour mieux le tuer :

      Tous les jours qui passent        elles empruntaient

      par voie de rupture en diagonale        les chemins

      de fracture        comme des mains magnifiques

      ressemblant étrangement à celles        du voyageur

      [...] alors ils comprirent que la Femme        c'est comme la

      pluie        elle fabrique l'oxygène du Temps[25]

    Cet amalgame entre passé, présent et futur constitue une façon de brouiller les cartes de ce temps qui les oppresse. Les femmes portent en elles ces trois dimensions temporelles (passé, présent, futur) comme un fardeau. Elles ne se sentent pas vivre. C'est pourquoi elles opèrent une transmutation temporelle. Leur temps devient imprécis à souhait pour narguer le temps social imposé qui, lui, est bien défini et rigoureux. Il va se situer ainsi entre le passé, le présent et le futur, aux confins de l'histoire, de l'actualité et de l'avenir.

    Pour conclure sur le rapport des poètes au temps et à l'espace, on peut dire que leur écriture s'inscrit dans l'espace social mais se projette aussi hors de cet espace qui les étouffe. Il en est de même du temps dont elles se détachent en le déplaçant, en le fragmentant ou en le niant tout simplement. Elles lui substituent le temps de leur écriture, mouvement d'aller-retour entre le passé, le présent et le futur. L'espace et le temps se trouvent ainsi complètement morcelés :

      Femme-espace
      Tu défies l'ordre du temps
      Carrefour-lieu de mille voies
      Du temps et de l'espace infinis[26]

    Cette vision du temps et de l'espace que proposent les poètes femmes influe considérablement sur leur manière d'évoquer l'enfance. Bernadette Sanou souhaite pour l'enfance l'élimination de toute barrière qu'elle soit culturelle, raciale, sociale, géographique, religieuse ou autre. Elle rêve d'un pays d'enfance sans limites ni frontières :

      Un enfant est un enfant
      Il n'est ni blanc ni jaune
      Il n'est pas noir
      Il est couleur d'enfant !
      Il n'est ni riche ni pauvre
      Il est trésor en soi
      ...
      Un enfant est un enfant
      Il n'est ni d'Est ni du Sud
      Il n'est pas du Nord, il n'est pas d'Ouest
      Il est du pays d'Enfance

      Il n'est ni de droite ni de gauche
      Il est du sigle ENFANT
      Il n'est ni juif ni mahométan
      Il croit au Dieu ENFANT
      ...
      Un enfant est un enfant
      Il est du pays d'Enfance
      ...
      Gommez haies et barrières
      Inconnues au pays d'Enfance
      ...
      Gommez les haies vives
      Vous êtes au pays d'Enfance
      Le pays du Rêve Bleu[27]

    Mais ce rêve d'une enfance heureuse sans frontières est encore loin de se réaliser.

    II. LE ROYAUME DE L'ENFANCE PERDUE

    L'une des caractéristiques de la poésie africaine au féminin est la forte présence d'une thématique relative à l'enfant. C'est le constat que fait Irène Assiba d'Almeida quand elle écrit : " Si les enfants sont de plus en plus présents dans les consciences nationales, ils sont au coeur même des stratégies d'écriture des poétesses africaines. On trouve en effet, dans le paysage poétique que dessinent les femmes, de nombreux poèmes concernant les enfants[28]".

    Le portrait de l'enfance que dressent les poètes est multiple mais il y a une récurrence de la souffrance que l'on remarque aussi bien dans les recueils pour adultes que dans les écrits pour enfants. Cette thématique de la souffrance transparaît comme un refrain lancinant. C'est donc vers la représentation de la douleur des enfants que nous allons nous orienter.

    Le marasme économique que vit le continent depuis des décennies a atteint toutes les couches sociales et cette crise n'a pas épargné de nombreux enfants qui se retrouvent dans les rues, laissés à eux-mêmes et démunis de tout. Cette souffrance des enfants d'Afrique peut s'envisager selon deux grands axes qui s'interpénètrent : l'enfance de la rue (qui comprend aussi bien les enfants abandonnés, exploités, affamés qu'ils soient en famille ou sans-abri) et l'enfance en guerre.

    1. L'enfance de la rue

    Dès son premier recueil, Latérite, Véronique Tadjo s'intéresse au sort des démunis et particulièrement à celui des enfants :

      NOUS DONNERONS UN NOM
      A CHAQUE MENDIANT DU COIN
      ET HABILLERONS DE BASIN
      LES PLUS PETITS D'ENTRE EUX
      [...]

    Elle rend hommage au courage de ces délaissés de la société :

      VOUS LES FOUILLEURS DE POUBELLES
      LES INFIRMES
      AUX MOIGNONS CRASSEUX
      LES BORGNES
      LES HOMMES RAMPANTS
      VOUS LES MARAUDEURS
      LES GAMINS DES TAUDIS
      JE VOUS SALUE[29]

    La souffrance des enfants est la plus insupportable qui soit, car elle touche des êtres sans défense, fragiles et vulnérables. Un sentiment d'impuissance et de révolte naît au regard de leurs conditions de vie misérables et inhumaines. L'acuité du problème des enfants de la rue est tel qu'on ne peut l'ignorer. Véronique Tadjo y revient dans un second recueil :

      Dans cette ville
      Où l'enfance se gaspille
      Court les rues pour quelques pièces
      Et fouille les ordures
      Où l'enfance se gaspille
      Déambule
      Au fil des jours
      Au fil des heures
      Au fil de son errance[30]

    Bernadette Sanou fait sien ce mal-être des enfants dans son premier recueil, Parturition :

      Faire mien le gamin tout nu
      Au ventre bombé par le mal de la malnutrition
      Mien le gamin en haillons
      Traînant dans la poussière des rues
      La peau du visage si blanchie par l'harmattan
      Tendant aux passants une boîte de tomate vide
      En guise de sébile[31]

    Tout se passe comme si les poètes revivaient à travers la souffrance des enfants de la rue leur propre douleur d'enfantement, comme si elles ressentaient dans leur chair l'injustice, la misère, la faim de ces enfants. Éternelle parturition pour ces poètes qui revendiquent ainsi leur triple identité de femmes, de mères, et d'écrivaines. Ce thème apparaît également dans Burkina Blues :

      J'ai mal en ces enfants
      ...
      Ces enfants
      A qui on n'a pas offert de choix
      ...
      Et les voilà à dormir sur des lits de fortune
      Aux abords du marché de Ouagadougou
      Et les voilà réduits à quémander leur quotidien
      Sur les autoroutes d'Abidjan[32]

    L'image des enfants de la rue crée un malaise en renvoyant à la société tout entière son impuissance qui suscite culpabilité et révolte. Le caractère insupportable de la situation justifie la présence presque obsessionnelle de ce thème sous la plume des poètes. Femmes, créatrices et procréatrices, elles ne peuvent rester insensibles à ce drame. Elles espèrent, rêvent, prient, crient et pleurent comme Ndèye Coumba Mbengué Diakhaté dans sa "Supplique pour les petits " avec cet indicatif (Voix de mère) mis entre parenthèses sous le titre :

      Si j'avais le pouvoir du sorcier magicien,
      Je ferais mes amis...
      O ! mais que de choses merveilleuses.

      Je ferais tout d'abord,
      Qu'on ne voie plus jamais,
      Sous aucun toit au monde,
      Des enfants affamés, tout perclus faute de pain

      Qu'on ne voie plus jamais,
      A ces rues sombres le soir,
      Des enfants en guenilles, grelottant sous le froid[33]

    La thématique des enfants dans la littérature africaine s'était déployée autour de la pauvreté, de la mendicité, du dénuement, de la faim, de la mortalité infantile. Depuis peu, un thème s'est ajouté à cette liste, la violence, et plus précisément la violence de la guerre, celle dont les enfants sont victimes et celle dont ils sont acteurs. On a observé la présence de ce nouveau thème à partir du moment où la guerre civile a éclaté dans certains pays du continent emportant les espoirs de sécurité et de paix de familles entières, de peuples, en somme, de toute une Afrique qui détient maintenant la palme du continent ayant le plus grand nombre de conflits armés sur son territoire. Tant que la guerre concernait des professionnels de la guerre, c'est-à-dire des soldats formés pour se battre et défendre des causes dont eux seuls connaissaient la validité et la justesse, nul ne s'en plaignait vraiment. Mais depuis que ces conflits impliquent des populations civiles et de plus en plus d'enfants, l'inquiétude gagne du terrain, embrasant du même coup l'illusion d'une enfance innocente et sainte. Des enfants soldats se retrouvent en effet sur plusieurs fronts de pays africains en guerre (Sierra-Léone, Somali, Tchad, Ouganda, Érythrée, Éthiopie, Libéria, Angola, Soudan, Rwanda, Burundi, Congo-Kinshasa et Congo-Brazzaville). Le témoignage le plus récent sur ce fait est celui que livre Ahmadou Kourouma mais on trouve également dans les recueils des poètes africaines cette thématique.

    2. L'enfance en guerre

    C'est un fait d'actualité que les premières victimes des conflits armés de par le monde sont les femmes et les enfants. Toutes les résolutions adoptées lors des rencontres internationales sur les conflits armés[34] recommandaient de mettre tout en oeuvre pour éviter de telles situations dramatiques où les plus vulnérables se retrouvent aux premières loges de la violence. Mais sans avoir réussi à trouver de solutions satisfaisantes à ce drame, voilà que les sociétés doivent faire face à un nouveau phénomène, celui de l'enrôlement des enfants dans les armées. Cet enrôlement forcé concerne des enfants de moins de 8 ans. Il est le fait d'armées de forces gouvernementales, de l'opposition ou de groupes paramilitaires. Selon les données de l'UNICEF, 300.000 enfants de dix-huit ans sont impliqués dans des guerres à travers le monde touchant 41 pays dont au moins 15 pays africains[35]. Malgré la ratification du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant de l'ONU en mai 2000, le sud Soudan compte encore 10.000 enfants soldats au front. De quelle façon cette triste réalité apparaît-elle dans la poésie africaine au féminin?

    " L'enfant soldat ", tel est le titre d'un poème de Marie-Léontine Tsibinda dans lequel elle fait le constat suivant :

      L'enfant devient soldat
      Avant de devenir humain
      Il s'abîme dans le vice
      Les ténèbres de la malhonnêteté l'enveloppent

      L'enfance s'est estompée
      Dans le sang visqueux de ses multiples victimes[36]

    Presque trois décennies avant elle, sa compatriote de l'autre Congo, Clémentine Faik Nzuji écrivait cette complainte :

      Ne pars pas mon chagrin
      Tant que périront ces enfants
      Sous le déferlement des crachats, de leurs fusils
      Ne taris pas ma larme
      Tant que pleurera cette mère
      Sur ses morts escortés
      Ne te tais pas ma voix
      Tant que voleront les éclats
      De leurs bombes atomiques[37]

    Si la complainte de Nzuji semble faire référence aux enfants victimes de la guerre des adultes tandis que celui de Tsibinda dépeint psychologiquement cette identité nouvelle de l'enfant-soldat, il n'en demeure pas moins que c'est le portrait de l'enfance, actrice ou victime de la guerre qui en ressort. Y a-t-il encore de l'espoir pour ces enfants qui ont perdu leur innocence? Du royaume de l'enfance, ces enfants ne connaissent rien. Leur univers se dit en termes de mitraillettes, de morts, de barbarie, d'inhumanité. Où pourraient-ils trouver la force de récupérer leur enfance volée ? Les programmes de démobilisation des enfants-soldats inaugurés par l'UNICEF au sud Soudan, au Rwanda et au Congo démocratique pour ne citer que ces pays-là ne semblent pas donner de grands résultats, vu le fort pourcentage de ces enfants qui retournent encore au front. Quel avenir leur est réservé ?

      L'avenir déchiré
      Aux quatre coins
      Des colonnes cuivrées
      Soldats hirsutes aux barbes noires
      D'un soleil cassé

      Quand donc se brisera
      La hache du bourreau
      Quand cessera l'odeur pestilentielle des chairs en décomposition[38]

    L'interrogation de Tsibinda est une invective adressée à tous les responsables des guerres, quel que ce soit leur camp et leurs idéologies. Invective pour que s'arrête ce qui n'aurait jamais dû commencer, le sacrifice d'une génération d'enfants qui s'éveille à peine à la vie. Enfance dilapidée et détruite par des bourreaux qui n'ont de vision que leur propre gloire, pantins auto-proclamés chefs de guerre qui envoient mourir des enfants quand, eux-mêmes restent à l'abri des balles et des mines meurtrières. Y a t-il lâcheté plus grande que cela ?

    EN GUISE DE CONCLUSION

    Etre enfant en Afrique aujourd'hui relève de l'exploit et de la gageure. Finies les belles années, où gambadant joyeusement sous l'oeil vigilant de toute une communauté, l'enfant africain s'épanouissait, insouciant. Les sociétés africaines en pleine mutation ont créé des situations dans lesquelles les enfants des deux sexes font face à de nouveaux fléaux : analphabétisme, drogue, délinquance, mendicité, prostitution, misère, sida. Les guerres fratricides aux conséquences incalculables ont fait des enfants des proies faciles et manipulables sous la férule de gens sans foi ni loi qui exploitent leur enfance et abusent de leur innocence. Quels souvenirs du royaume d'enfance auront ces enfants quand leurs mémoires sont pleines de morts, de sang, d'atrocités ? Le chant des poètes peut-il encore leur parvenir ? Entendront-ils Tadjo qui s'écrie :

      Nous irons chercher l'espoir
      Et nous le sortirons
      De son enclave profonde
      Refusant l'indifférence et l'abandon
      Nous irons chercher l'espoir[39]

    Pour l'Afrique dont la population, pour plus de moitié a moins de 15 ans, refuser d'espérer, c'est se condamner à périr et à disparaître de la carte du monde. Elle se doit comme continent et comme communauté de peuples de trouver rapidement des moyens d'éradiquer les maux touchant particulièrement l'enfance et la jeunesse et surtout de les protéger contre de tels maux. Si comme le dit le proverbe, l'avenir d'une nation dépend de sa jeunesse, celui du continent tout entier s'avère problématique et hypothéqué vu le portrait qui ressort de cette analyse de la thématique de l'enfance chez les poètes africaines.

    Mais le rôle du poète est de " savoir bâtir sur les ruines des cités, savoir tracer les chemins de la liberté[40]". C'est pourquoi malgré la nuit, malgré la situation désespérante, les poètes africaines choisissent d'espérer et de croire que demain sera un autre jour[41]. Elles peuvent donc chanter :

      Il est soir
      Il fait presque nuit
      Mais demain il fera jour[42]

    Notes

    [1] France 2 (2002). Voir aussi : Ignacio Ramonet Enfants exploités Le Monde Diplomatique Juillet 2002.

    [2] C'est sous la houlette d'Houphouet Boigny, alors député au Parlement Français que fût votée la loi abolissant les travaux forcés en 1946 dans les colonies de l'A.O.F. (Afrique Occidentale Française) et de l'A.E.F.(Afrique Equatoriale Française) et ce, un an après la loi Gaston Deferre qui permit justement à des leaders comme Houphouet, Blaise Diagne, Senghor de se présenter et de se faire élire au Parlement Français.

    [3] Documentaire du Réseau de l'Information (RDI à la télévision de Radio Canada) : " Les enfants soldats ", janvier 2002. Lire aussi : La guerre. Enfants admis - 300 000 enfants-soldats dans le monde : comment combattre ce fleau? Ouvrage publié par le Groupe de Recherche et d'Information sur la Paix et la Securité (GRIP) et coordonné par Marc Schmitz, Bruxelles, Editions GRIP/Editionc Complexe, 2001, 192 p.

    [4]Camara Laye, L'Enfant noir Paris, Librairie Plon, 1953.

    [5] Ahmadou Kourouma, Allah n'est pas obligé, Paris, Seuil, 2000.

    [6] Aimé Césaire, Cahier d'un retour au pays natal, Paris, Présence Africaine, 1939.

    [7]Léon Gontran Damas, Pigments, Paris, Présence Africaine, 1937

    [8] Léopold Sédar Senghor, Chants d'Ombre, Paris, Présence Africaine, 1945.

    [9] Maxime Ndebeka, " Enfant ", Soleils neufs, Yaoundé, Clé, 1969.

    [10]Voir les poèmes suivants : " Kassack ", " Labane ", " Berceuse ", " Esquisse ", " Indépendance ", " Témoignage " dans Poèmes africains, Paris, Centre national français, 1965 et Kaddu, Dakar, Imprimerie Amadou Diop.

    [11] Véronique Tadjo, Latérite, Paris, Hatier, 1983, p. 30.

    [12] Titinga Frédéric Pacéré, " Je suis né dans un village ", Refrains sous le Sahel, Paris, P.J. Oswald.

    [13] Clémentine Faik-Nzuji, Kasala, Kinshasa, Éditions Mandore, 1969.

    [14] Maxime Ndebeka, op cit, p. 55

    [15] Tanella Boni, " Cordes de femmes ", Grains de sable, Limoges, Le bruit des autres, 1993, p. 61.

    [16] Irma Garcia, Promenades femmilières, Paris, Éditions des Femmes, 1981, pp. 199-200.

    [17] Claudine Hermann, Les voleuses de langue, Paris, Éditions des Femmes, p. 150.

    [18] Kiné Kirama Fall, " L'Essor ", Les Élans de grâce, Dakar, NEA, 1979, p. 52.

    [19] Tanella Boni, Grains de sable, Limoges, Le bruit des autres, 1993, p. 9.

    [20] Tanella Boni, Grains de sable, Limoges, Le bruit des autres, 1993, p. 30.

    [21] Idem.

    [22] Irma Garcia, op. cit., pp. 204-205.

    [23] Véronique Tadjo, op. cit., p. 93.

    [24] Tanella Boni, op. cit., p. 19.

    [25] Ibidem, p. 39.

    [26] Tanella Boni, " Mirabelle ", Labyrinthe, Lomé Akpagnon, 1984, p. 36.

    [27] Bernadette Sanou, Enfant sans frontières, Quote-Part, Ouagadougou, Imprimerie Nationale, 1993, pp. 7-8.

    [28] Irène Assiba d'Almeida : " L'enfant au coeur des stratégies d'écriture des poétesses africaines ", Nottigham French Studies, vol. 40, no 1, Spring 2001, pp. 63-74.

    [29] Véronique Tadjo, Latérite, pp. 22-23.

    [30] Véronique Tadjo, A mi-chemin, Paris, L'harmattan, 1999, p. 72.

    [31] Bernadette Sanou, " Le peuple de mon pays ", Parturition, Ouagadougou, Imprimerie Presses Africaines, 1988, p. 16.

    [32] Angèle Bassolé, Burkina Blues, Québec, Humanitas, 2000, pp. 38-39.

    [33] Ndèye Coumba Mbengué Diakhaté, Filles du soleil, Dakar, NEA, 1980, p.22.

    [34] Conférence d'Ottawa sur la résolution des conflits armés en Afrique, ACDI- Gouvernement canadien, Ottawa, Mai 1997. Conférence de Bujumbura sur les droits des enfants en 2000.

    [35] Rapport de l'UNICEF sur la situation des enfants dans le monde, Genève, 2000.

    [36] Marie-Léontine Tsibinda, " L'enfant soldat ", La route du sang, sous presse aux Editions Bajag-Meri, Jouy le Moutier, France.

    [37] Clémentine Faik Nzuji, Lianes, Kinshasa, Éditions du Mont Noir, 1971.

    [38] Marie-Léontine Tsibinda, " L'avenir déchiré " La route du sang, sous presse aux Editions Bajag-Meri, Jouy le Moutier, France.

    [39] Véronique Tadjo, A mi-chemin, pp. 74-76.

    [40] Véronique Tadjo, Latérite, p. 22.

    [41] Marie-Léontine Tsibinda, Demain, un autre jour, Ivry-sur Seine, Silex, 1987.

    [42] Werewere Liking, " Une raison d'espérer ", On ne raisonne pas le venin, Paris, Éditions Saint-Germain-des Prés, 1977, p. 60.


    Angèle Bassolé-Ouédraogo est actuellement Coordonnatrice de projets à la Table Féministe Francophone de Concertation Provinciale de l'Ontario [TFFCPO] (regroupement d'une trentaine d'organismes de femmes francophones de l'Ontario (Canada). Le mandat de la TFFCPO est de promouvoir les droits à l'égalité des femmes francophones de l'Ontario par la recherche-action et l'intervention sur la scène politique. Angèle Bassolé-Ouédraogo est responsable du dossier Immigration et siège à ce titre au comité exécutif de l'organisme.
    Ses dernières publications comprennent les articles suivants : "Mon rêve de l'égalité" Actes du forum national des femmes canadiennes françaises, Ottawa, Mars 2000. "Elles se souviennent, nous nous souvenons : la mémoire en exil" La parole mémorielle des femmes, Montréal, Les Editions du remue-Ménage, 2002, pp. 13-16. "La dette éternelle" Actes du colloque sur l'immigration en région, Sherbrooke, 2001 ; "Les femmes africaines dans la francophonie mondiale" Actes du colloque de la 39e Biennale de la langue française, Hull-Ottawa, juillet 2001. "Les amazones de la paix" Femmes africaines en poésie, Palabres, Bremen, 2001, pp. 127-134.
    Angèle Bassolé-Ouédraogo termine son second recueil de poésie Avec tes mots. [Extraits] dont la publication est prévue pour 2002. De plus, elle a créé les Éditions Malaika, une maison d'édition à vocation africaine, basée à Ottawa et dont le lancement de presse s'est fait à la dernière édition du FESPACO en février 2001 à Ouagadougou, au Burkina Faso.

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    Et les Africaines prirent la plume! Histoire d'une conquête
    (1998)
    Les mémoires absentes! Femmes, Afrique, parole et écriture
    (2000)

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