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Les Frères de Dieu
UNE NOUVELLE
de
Ghislaine Nelly Huguette Sathoud
Prière de lire la notice sur la protection des droits d'auteur |
Depuis quelques jours, la réputation des "Frères de Dieu"
grandit de plus en plus. A la vitesse d'une
fusée, cette nouvelle Eglise gagne du terrain. Le nombre des adeptes ne
cesse de croître car la situation catastrophique du pays pousse
même les plus sceptiques à croire en Dieu. Tout le monde veut
louer le seigneur et chacun manifeste sa piété à sa
manière. Même dans les bars, on danse maintenant au rythme des
chansons religieuses. Les Eglises poussent comme des champignons. Il en est de
même des prophètes. Les croyants ne savent plus à quel
Saint se vouer et l'Eglise "Les Frères de Dieu" continue sa spectaculaire
ascension. On dit que le prophète opère des miracles sans
précédents. On dit aussi qu'il est plus puissant que tous les
autres prophètes de la place. On dit encore qu'il enlève les
mauvais sorts jetés par les sorciers et qu'il ressuscite les morts. Il
paraît qu'il guérit les cas de sida. On dit même qu'en
dehors de Jésus Christ le fils de Dieu, personne ne peut réaliser
ses exploits.
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- Ma chère collègue, disait-elle, pendant près de dix ans, je n'ai cessé de courir tous les guérisseurs, je suis allée dans tous les hôpitaux et malgré ça ma fille se portait toujours mal. Le prophète Moïse est venu pour nous sauver. Il est mon Dieu ! Et je ne sais vraiment pas que lui offrir en guise de remerciement.
- Finalement, de quoi souffrait ta fille ?
- C'est une longue histoire ! Mon mari voulait la donner en sacrifice pour devenir riche... ! Mais ce qui importe, c'est sa guérison. Ma chère amie Dieu est grand !
- Oui, je le sais. Je suis croyante...
- Attends, il ne faut pas jouer avec les mots. Il y a croyante et croyante hein !
- Pour être franche avec toi, je ne vois pas ce que tu veux dire. Je crois en Dieu le père tout puissant créateur du ciel et de la terre. Je crois en Jésus-Christ, son fils unique notre seigneur ...
- Est-ce que tu vas à l'Eglise le dimanche ?
- Je ne peux pas te dire que j'y vais tous les dimanches. Néanmoins, je ne manque jamais une occasion de glorifier le seigneur. Mon Eglise est située à deux pas de la maison de tes grands-parents.
- Tu vas là-bas ?
- Pourquoi? Ma mère y allait avec sa grand-mère et depuis des générations nous y allons. Penses-tu que ce n'est pas un endroit recommandable ?
- Au nom de Jésus, il n'y a pas une Eglise meilleure que la mienne. Ma chère soeur vient avec nous ! Viens voir le seigneur accomplir des merveilles ! Viens, tu seras heureuse ! Viens, tu te réjouiras !
- Mais, je me sens bien où je vais..
- Tu crois te sentir bien. Ce ne sont que des illusions. Ma chère soeur, tu es une véritable aveugle. Là-bas, vos dirigeants ne disent pas la vérité. Viens découvrir les mystères cachés de la bible. Je veux simplement te rendre service. Je tiens à te faire découvrir la vérité.
Un peu par curiosité, j'ai décidé d'aller assister à une séance de prière. Et puis, je souffre de violents maux de tête depuis des années et une chance de guérir, c'est toujours bon à prendre. Quant au reste, cela n'avait réellement pas d'importance à mes yeux. Un croyant est un croyant et je ne voulais pas me fier aux doctrines. Cette idée me donna le courage de me présenter à l'Eglise des Frères de Dieu. Alors que je franchissais le seuil du portail, je fus rattrapée par un homme très agité.
- On ne rentre pas de cette façon en terre sainte, me lança-t-il avec arrogance.
Le "gardien" voulait m'empêcher de passer. Depuis mon jeune âge je cours les Eglises. J'y suis allée tour à tour en compagnie de ma mère, mes tantes, ma grand-mère, parfois même avec des amies. C'est la première fois que l'on m'interdisait de rentrer dans un lieu de prière. Je ne comprenais vraiment rien du tout.
- Que se passe-t-il ? questionnais-je avec surprise.
- Regardez-vous ! Une femme ne rentre pas dans la maison de Dieu sans se couvrir la tête.
- Ah ! c'était ça ?
- Je vais vous donner un mouchoir de tête pour la circonstance. La prochaine fois, vous veillerez à cela. Vous ferez également attention à votre tenue vestimentaire. Qu'est ce que vous portez là ? Quelle est cette façon de s'habiller ? Une femme qui a l'Esprit-Saint en elle ne s'habille de cette façon. Une femme ne porte pas des vêtements d'homme ! Ici, les femmes ne portent pas de pantalons... Vous ressemblez à Jézabel
- Jéza... Quoi... ?
- Je vois, vous êtes dans le monde.
- Dans le monde... ?
- Oui, dans le monde. Nous désignons ainsi en langage "saint" ceux qui ne "connaissent" pas Dieu. Et Jézabel dans la bible est une femme qui représente les femmes du "monde". Regardez toute cette peinture sur votre visage. Pourquoi faites-vous cela ? J'imagine que c'est pour plaire aux hommes Vous êtes vraiment la réincarnation de Jézabel !
Cette altercation avec ce "gardien" heurta ma dignité. Je n'avais rien fait à cet inconnu. Je ne supportais pas qu'il me traite de façon aussi insolente. L'idée de rebrousser chemin me traversa l'esprit mais je décidai de rester parce que mes amies m'avaient précédée et ignoraient cet incident. Le "gardien" me tendit ce qu'il appelait un mouchoir de tête: une espèce de tissu d'une propreté douteuse avec de nombreux trous. Ce mouchoir me donna la chair de poule et je reculai.
- Vous pouvez repartir madame. Tant pis. Allez-vous-en ! Je ne vous permettrai jamais de " souiller" la maison de Dieu. Non, je ne vous le permettrai jamais.
- J'ai une écharpe dans mon sac, lui répondis-je, je pourrais m'en servir pour couvrir ma tête. Qu'en pensez-vous ?
- C'est acceptable, dit-il, mais je tiens à le répéter, il est formellement interdit de rentrer dans la maison de Dieu sans couvrir la tête.
- D'accord. Je respecte votre principe.
- Alors rentrez madame !
Un jeune garçon debout, tenant une bible à la main entretenait la foule. Il portait de grosses bagues et une grande croix en guise de collier.
- Le Seigneur va revenir bientôt ! disait le jeune garçon. Soyez prêts à l'accueillir Je vais vous faire une confidence. J'ai à peine vingt cinq ans. Dieu a décidé d'agir en moi. Je priais dans une Eglise lors de ma rencontre avec Dieu. J'ai dû partir pour sauver ma peau. Les gens sont jaloux. Les pasteurs m'en voulaient. Ils se demandaient comment Dieu pouvait donner une si grande puissance à un jeune de mon âge. Je vais vous le dire. Dieu a voulu agir en moi pendant des années. J'ai résisté. Je voulais terminer mes études. Mais Dieu est plus puissant que tout le monde. A l'école, je n'entendais plus les professeurs. Seule la voix du tout puissant résonnait dans mes oreilles. Tout le monde disait que j'étais devenu fou ! Quand je discutais avec Dieu, les gens pensaient que je parlais seul. Bref, je n'avais pas d'autres choix que d'abandonner mes études. J'ai demandé à Dieu: "Seigneur ! comment vais-je me nourrir ?" Il a répondu que les fidèles prendraient soin de moi... Et je ne regrette rien. Tous les jours, vous m'apportez des dons. Mais ce n'est pas à moi que vous faites ces dons. Vous donnez à Dieu. Je profite de cette même occasion pour dire un grand merci au frère Kingadi qui a bien voulu donner sa parcelle pour le travail du seigneur. Je n'oublie pas la soeur qui a fait le don des chaises à l'Eglise. Elle préfère que je ne divulgue pas son nom. Merci aussi pour les cotisations à propos de la construction de l'Eglise. Je suis au regret de vous dire que nous sommes loin de réaliser ce projet. Sincèrement, mes frères et soeurs, il faut prendre les choses au sérieux. Vous n'avez pas encore regardez dans toutes les poches de vos sacs. Dieu voit tout ! Dieu sait tout ! Je discute avec Dieu. Je lui parle face à face, comme je vous parle. Et en plus, il me doit beaucoup de respect. Il a envoyé son fils unique Jésus Christ, les humains l'ont tué. J'ai décidé de venir en mission. Je suis le frère de Dieu...
- Amen... Répondit la foule.
- Jésus-Christ a beaucoup de considération et de respect pour moi poursuivit le prophète. Donnez l'argent pour la gloire de notre Dieu !
- Amen... Répondit encore la foule.
- Eh ! Mes frères et soeurs Dieu est miséricordieux.
- Amen... Amen!
- Eh ! mes frères, un bon chrétien doit verser le dixième de son salaire à l'Eglise...
- Amen... Amen !
En vérité je vous le dis mes frères, mes soeurs, celui qui ne verse pas la dîme ne franchira pas les portes du paradis, Alléluia
- Amen... ! Alléluia !
- Chers frères et soeurs, quand l'église sera construite Dieu manifestera sa puissance. Ah mes frères, Alléluia!
- Amen... ! Alléluia
- Eh ! mes frères, le peuple de Dieu meurt faute de connaissance...
- Amen... ! Ainsi soit-il ! Gloire à Dieu !
- Eh ! Mes frères, les autres Eglises cachent la vérité aux fidèles.
- C'est la vérité, Amen !
- Amen! Amen!
- En vérité je vous le dis, je suis le seul berger qui dise la vérité sans aucune crainte...
- C'est juste. Amen !
- Les autres ne font pas comme moi.
- Alléluia ! Alléluia!
- Je suis différent d'eux. Ils sont différents de moi.
- Gloire à Dieu !
- Je suis le frère de Dieu et l'oncle de Jésus-Christ. Je suis Dieu aussi.
- Nous te louons ! Nous te glorifions ! Amen !
- C'est maintenant le moment d'apporter des offrandes à Dieu.
On vit alors défiler toutes sortes de choses. Des femmes donnaient au Berger suprême des biens gagnés "illégalement" , c'est-à-dire les biens achetés par les amants et même par les maris lorsqu'ils ne connaissaient pas la "vérité". Certains adeptes apportèrent des télévisions. D'autres apportèrent des fauteuils. D'autres encore donnèrent des vêtements. Une dame se présenta au milieu de la scène avec des clés.
- Mes chers frères dit-elle, J'ai décidé de donner ma voiture à l'Eglise. C'est un cadeau d'un homme marié pendant que j'étais encore dans "le monde". Je ne veux plus des péchés.
- Alléluia ! Alléluia ! Répondait l'assistance.
- Que Dieu te bénisse ma soeur ! Après avoir "chassé" les démons dans cette voiture, elle nous aidera pour les courses de l'Eglise. Les autres frères et soeurs devraient se servir de cet exemple. Chantons et prions pour la bénédiction les offrandes !
Après le manège des offrandes, on passa aux témoignages. Ce que j'entendis me donna des frissons. Une dame se leva fièrement:
- Mes frères en Christ, dit-elle, êtes-vous bien là ? Alléluia !
- Alléluia répondit l'assistance.
- J'ai été sauvée par Dieu. Mon mari était dans le" monde". Il a fini par avoir la maladie des "mondains". Le fameux sida qui est en réalité une punition que Dieu inflige à ceux qui ne veulent pas le respecter. Mais notre berger assis en face de moi a réussi à me guérir. Alléluia mes frères !
- Alléluia ! Gloire à Dieu ! Hurla l'assistance en signe d'approbation.
- Comme je vous le dis souvent, interrompit le Berger. Mes brebis, mes frères, mes soeurs, un vrai chrétien marche sur le sida. Cette maladie éprouve de la crainte pour les vrais enfants de Dieu. Je parle des vrais enfants de Dieu, hein ! Pas des prétendus chrétiens .
- Alléluia! Alléluia hurla l'assistance.
- Je n'ai plus grand chose à dire poursuivit la femme. J'ai vaincu le sida. Pendant que les "mondains" passent le temps à chercher dans les laboratoires le remède pour cette maladie redoutable. Ils dépensent des fortunes et des fortunes, nous avons au moins la chance d'avoir notre Berger.
- C'est une véritable chance, Alléluia ! Répondit l'assistance.
- Avant que vous ne partiez, je vous répète la même chose que d'habitude, ajouta le prophète. Nombreux sont ceux qui chercheront à vous détourner du droit chemin en critiquant "L'Eglise des Frères de Dieu". C'est à vous de défendre notre Eglise. C'est à vous de me protéger. Par ailleurs, il faut toujours ramener de nouveaux adeptes. Quand vous venez avec des nouveaux adeptes, votre crédibilité auprès de Dieu ne cesse de croître, hein mes frères ?
- Alléluia ! hurla l'assistance, toute parole qui sort de la bouche du prophète est une vérité d'Evangile.
- Je le dis pour vous. En ce qui me concerne, j'ai déjà ma place au paradis. Quand vous rencontrez des personnes qui hésitent à venir avec nous, il suffit de raconter que que nous guérissons toutes les maladies. Vous pouvez aussi dire que nous avons des potions magiques qui rendent les sorciers impuissants.
- Amen ! répondit l'assistance.
- Obéissez à votre prophète.
- Nous te louons, nous te glorifions ! répondit l'assistance.
- Je reste avec les nouveaux. Ils ont besoin d'une "délivrance". Que le Seigneur Dieu vous raccompagne dans vos demeures respectives !
La cour se vida, puis, chacun des "nouveaux" donna l'objet de sa présence en ces lieux. Je fis comprendre au prophète que je souffrais des violents maux de tête depuis de nombreuses années. Après une longue période de concentration, il prit la parole et me demanda:
- Que s'est-il passé avec votre père ?
- Mon père ?
- Oui, je m'adresse à vous. Ce n'est pas la peine de vous retourner. Quand je pose des questions, il ne faut pas me faire perdre du temps.
- Mais...
- Il faut répondre ! gronda un de ses acolytes. C'est comme ça ici. Dieu voit les choses les plus secrètes.
- En fait, je suis surprise....
- Ah ! le prophète est très puissant. Il te dira des choses auxquelles tu ne t'attends pas. Nous sortons des choses réelles et secrètes. Pour éviter que Dieu s'éloigne, il faut dire oui à ce que le maître te raconte. Il ne faut surtout pas faire attention à sa jeunesse. Dieu choisit lui-même la personne qui doit accomplir son oeuvre.
- Qu'en est-il de votre père ? répéta le prophète
- Je ne sais pas ce qu'il me reproche.
- Tu ne le sais vraiment pas. Pauvre de toi ! Tu lui donnes pourtant tout ce dont il a besoin et il est un éternel insatisfait.
- Pauvre femme, répondait les frères en Christ en choeur. Seigneur, nous te prions de "lier" les démons du père de cette soeur. Au nom de Jésus, démons, sortez du corps de cette soeur !
- Ma soeur, dit le prophète, c'est ton père qui est à l'origine de tous tes malheurs. Je propose que tu l'emmènes ici sans pour autant lui dire quoi que ce soit à propos de mes révélations. Il risquera de refuser de venir. Quand il sera en face de moi, je ferai tout le travail. Je peux anéantir tout ce qu'il fait. Mais c'est par un face à face que je procède dans ce genre de cas.
- C'est justement là le problème. Je manifeste des inquiétudes...
- Il ne se passera rien de fâcheux !
- Le prophète commença à me tutoyer pour créer plus de familiarité.
- J'ai un problème.
- Ma soeur, je t'écoute.
- Je n'ai pas-de père...
- Comment ? Tu n'es pas quand même conçu du Saint-Esprit ?
- Non.
- Alors tu as un père !
- Certainement. Mais je ne le connais pas. Mon père n'a pas survécu à un accident de voiture alors que ma mère était enceinte de deux mois seulement.
- Mais pourquoi tu ne l'as pas dit plus tôt ?
- C'est ce que je voulais dire quand j'ai reçu l'ordre de toujours répondre positivement à ce que vous dites pour garder la présence de Dieu parmi nous.
- En tout cas, je vois un homme... Ma soeur, ta mère n'était pas mariée ?
- Je peux dire la vérité... ? Faut-il encore mentir pour garder la présence de Dieu ?
- Ma soeur, je t'écoute, tu dois répondre sincèrement à la question. La voix du maître devenait de plus en plus confuse et le regard vague. Il transpirait et balbutiait. Je commençais à avoir peur. Mais je tenais à dire la vérité. Rien que la vérité seulement la vérité.
- Ma mère est restée célibataire depuis toujours.
- Mais qui est ce monsieur ? C'est peut-être un oncle ?
- Je n'ai pas d'oncle, grand maître. Ma mère est fille unique de ses parents.
- Dieu, lui-même lèvera le voile sur ce mystère ? poursuivit le prophète. J'ai l'impression que c'est ton mari. Qu'en penses-tu ?
- Je ne sais pas. C'est à vous que Dieu parle.
- C'est bien lui. Il a peur que tu le quittes.
- En fait grand maître, mon problème est clair. Je ne veux pas connaître l'origine de ma maladie. Je veux seulement retrouver la bonne santé.
- J'aime donner l'origine de la maladie avant de faire autre chose.
- Je ne sais vraiment pas ce que gagnerait mon mari en détruisant ma vie. Et puis il prend grand soin de moi. Il m'a envoyée en Europe, en Amérique, en Asie et même au Moyen-Orient pour me faire soigner. Mon mari ? Je ne pense pas.
- Tu sais ma soeur, quand Dieu montre des choses, il y a parfois des confusions. Le "Diable" aussi se tient à côté. Il montre également des choses pour semer la confusion dans mon esprit. Etant donné que je n'ai pas encore procédé à ta "Délivrance", ce sont les visions du diable qui prennent le dessus.
- Alléluia ! Amen ! lancèrent les frères en Christ en signe de soulagement.
- Je te conseille de venir avec ton mari recommanda le prophète.
Malgré mes soupçons au sujet de la crédibilité des "Frères de Dieu", je décidais quand même d'aller chercher mon mari. Je tenais à ma guérison. Moins d'une heure après nous étions de retour mais cette fois le prophète s'était bien préparé. Une quinzaine de personnes nous attendaient.
- Soyez les bienvenus mes frères, dit le prophète. Dieu est grand. J'ai discuté sérieusement avec lui. Il y a une seule solution pour résoudre votre problème.
- Monsieur... Mon frère veux-tu de la guérison de ta femme ?
- Je le veux. Je peux mettre tous les moyens financiers en oeuvre pour régler cette question.
- Madame, ma soeur veux-tu guérir ?
- Dieu lui-même sait ce que je ne cesse de lui demander dans mes prières. J'en ai marre de souffrir tous les jours.
- Voilà ce que mon frère Dieu a dit au sujet de la maladie. Le problème est simple. Dieu réserve lui-même un conjoint à chacun de nous. Selon son programme... Ce n'est pas pour rien que vous êtes venu ici hein ! Aucun autre pasteur ne peut résoudre ce problème. Je suis le plus puissant des serviteurs de Dieu... La solution c'est votre séparation. Tu n'es pas la femme que Dieu a réservé à mon frère. Si tu insistes, tu deviendras folle. D'ailleurs, tu risques même de perdre ta vie. Cette maladie te conduira dans la tombe. En fait quand tu as mal, c'est Dieu qui veut que tu libères le mari d'autrui. Cette place ne t'appartient pas. Tu t'accroches à l'argent de mon frère. Je prierai pour demander à Dieu de me montrer ton mari. Quant à mon frère, Dieu a donné sa réponse. C'est notre soeur Marie qui est la femme de sa vie.
- Alléluia! Alléluia! Affirma l'assistance.
- Merci Seigneur dit Marie, merci de m'avoir donné l'occasion de retrouver enfin l'homme de ma vie. Que ton Nom soit sanctifié seigneur ! Que ta miséricorde accompagne ma soeur dans la recherche de l'homme de sa vie !
- Je comprends ton émotion ma soeur, poursuivit le prophète. Après toutes ces longues années d'errance, tu rencontres enfin l'homme de ta vie. Cependant, j'aimerais finir de parler à ma soeur qui veut recouvrer la santé. Tu viendras t'installer ici et nous t'accompagnerons dans la démarche pour retrouver l'homme de ta vie...
- Ce n'est pas croyable ! dit mon mari. J'ai entendu parler de ces conneries mais, je n'y croyais pas. Je vous charge de dire à votre Dieu que je suis en mesure de choisir moi-même ma femme.
- Je ne pouvais pas rester muette devant cette situationet je décidai moi aussi de parler au pasteur et à ses adeptes. J'étais doublement touchée parce que "la femme" de mon mari était celle qui témoignait sur la guérison du sida. Etait-ce là sa bénédiction ?
- Je ne sais pas de quel Dieu vous parlez. Le Dieu vivant ne tolèrerait pas cela. Il ne faut pas désunir ce que Dieu a unit. Je suis mariée depuis trente ans. Mon mari n'avait rien au moment de notre rencontre. Il était encore étudiant. Jours après jours, nous avons réussi à devenir ce que nous sommes. De cette union sont nés sept enfants. Vous osez vouloir donner une autre femme à mon mari ! Non, c'est l'esprit du Diable qui vous guide. C'est vous les véritables démons. Dieu merci, vous n'avez pas attendu longtemps pour montrer vos réelles intentions. Avec moi vos mensonges ne marchent pas. Ah ! Les Frères de Dieu? Quel est votre Dieu ? Je ne peux pas permettre cela. Si vous détruisez mon mariage, je porterai plainte à la cour céleste. Je crois en une justice divine. Elle est sincère dans son jugement. Merci à Dieu de m'avoir donné la capacité de savoir discerner les choses. Ah ! Les Frères de Dieu.... !
- Ma soeur, il ne faut pas douter des prophéties divines. Qu'est ce qui prouve que ton mariage est une bénédiction divine ? Le Diable vit à nos côtés...
- Vous n'êtes pas un prophète de Dieu. Je suis certaine que c'est l'esprit du Diable qui vous guide.
- Les femmes sont à l'origine de tous les maux qui minent la société, répliqua prophète. C'est Eve qui a entraîné Adam dans le péché. Il y a encore de nos jours beaucoup de femmes qui causent du tort à autrui. De toutes les façons, même les traditions nous conseillent de se méfier de ces êtres là.
- Amen ! affirma l'assistance.
Les femmes n'avaient rien à dire. Pour les Frères de Dieu, elles n'ont pas le droit de contredire le prophète et elles se font traiter de tous les noms. Ici, on affirme que la véritable place de la femme est dans la cuisine et les femmes qui ne respectent pas ce principe sont accusées d'être guidées par des esprits démoniaques.
- Mes frères, mes soeurs, poursuivit le prophète, je vous prie d'éloigner ce couple. S'il vous plait mes frères... L'eau bénite... Où est l'eau bénite ? Il faut arroser ...
Des disciples s'approchaient menaçants. La situation devenait délicate.
- Ne bougez pas, nous partons, dis-je. Pas la peine d'user de la force.
- Alors partez vite, sinon c'est tant pis pour vous.
- Oui, nous partons, s'empressa de dire mon mari.
- Je vous donne une minute pour disparaître, hurla le prophète.!
- Et vous vous prétendez être un serviteur de Dieu ? répliquai-je, mais mon mari m'interrompit...
- Partons ! dit-il en me prenant par le bras.
- Ne revenez jamais ici, dit le prophète
- Que cela soit écrit. Amen ! hurla l'assistance.
© Ghislaine Sathoud
[Page de l'auteur dans le site "Lire les femmes"] - [Table des matières de MOTS PLURIELS no 11]